Le contentieux des autorisations de construction d’antennes de téléphonie mobile

Fabrice Sebagh
Philippe Robin

Les autorisations d’urbanisme relatives aux antennes de téléphonie mobile alimentent un contentieux dont la présente affaire offre une récente illustration.

En effet, à l’origine de la décision de la deuxième chambre du Conseil d’Etat du 3 mai 2022 (n° 453520), le maire d’une commune du Nord de la France avait refusé de délivrer aux sociétés Cellnex France et Bouygues Télécom un certificat attestant de l’obtention d’un permis de construire tacite en vue de l’édification d’un pylône destiné à accueillir une antenne relais dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable.

Dans cette affaire, les parties s’opposaient sur le sens devant être donné au silence gardé par l’autorité administrative à l’expiration du délai d’instruction sur une demande de permis de construire (rejet de la demande ou, au contraire, délivrance d’un permis tacite ?).

Plus précisément, il s’agissait de savoir si le projet des sociétés Cellnex France et Bouygues Télécom devait ou non être regardé comme relevant des dispositions de l’article R. 424-3 du code de l’urbanisme qui prévoient l’intervention d’une décision implicite de rejet à l’expiration du délai d’instruction s’agissant de certains projets soumis à l’« accord » de l’architecte des Bâtiments de France (ABF).

Le Conseil d’Etat apporte à cette question une réponse négative.

En effet, la décision commentée retient que, « […] si la délivrance d’une autorisation de construction d’une antenne relais dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable est soumise à un avis de l’architecte des Bâtiments de France, cet avis n’est pas un avis conforme » (pt. 4).
Par conséquent, le Conseil d’Etat en déduit que « […] le silence gardé par l’autorité administrative sur [un tel projet] fait naître à l’issue du délai d’instruction un permis de construire tacite, alors même que l’avis [donné par l’architecte des Bâtiments de France] a été assorti de prescriptions » (ibid.).

Faisant application de ces principes au litige, le Conseil d’Etat annule l’ordonnance du juge des référés qui avait retenu la solution contraire (pt. 5).
Réglant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat fait droit à la demande présentée par les sociétés Cellnex France et Bouygues Télécom sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative.

Pour ce faire, le Conseil d’Etat fait notamment application sa récente jurisprudence Société Hivory du 24 février 2022 (n° 454047, aux Tables).
En l’espèce, il retient que la condition d’urgence est satisfaite, eu égard à l’intérêt public qui s’attache à la couverture du territoire national par le réseau de téléphonie mobile et à l’objet même du certificat demandé qui répond à la nécessité, pour les sociétés requérantes, d’attester de l’autorisation requise pour réaliser les travaux.

Droit publicDroit rural
Article suivant
La notion de bien mal acquis de nouveau devant la Cour de cassation
Article précédent
Le préjudice d’attente et d’inquiétude : un nouveau poste de préjudice distinct du préjudice d’affection