Limitation de la responsabilité du transporteur maritime : modalités de calcul de l’indemnité

Catherine Bauer-Violas

Le droit maritime connaît des règles de responsabilité particulières.

En effet, le transporteur maritime voit sa responsabilité limitée en cas de préjudice. Cette limitation consiste en la fixation par l’article 4.5 c) de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l’unification de certaines règles en matière de connaissement modifiée par les protocoles du 23 février 1968 et du 21 décembre 1979, d’un montant d’indemnisation maximum.

Dans une récente décision (24 mai 2023, Req. n° 21-19.835), la Cour de cassation s’est prononcée sur les modalités de calcul de ce montant.
Le montant de base de l’indemnisation fixé par le texte, pour les transports soumis à la Convention de 1924, est de 666,67 droits de tirage spéciaux (DTS) – une unité monétaire créée par le FMI –  par colis ou unité ou de 2 DTS par kilo, la limite la plus élevée étant applicable.
La question posée est celle du calcul  de l’indemnité due en cas d’avarie en application de l’article 4.5 c) de la convention de Bruxelles lorsque  le  contenu  du  conteneur  ou  de  la  palette  est  détaillé  dans  le connaissement avec le nombre de colis qu’il renferme.
L’article en question précise en effet :

«Lorsqu’un  cadre,  une  palette  ou  tout  engin  similaire  est  utilisé  pour  grouper  des marchandises, tout colis ou unité énuméré au connaissement comme étant inclus dans cet engin sera considéré comme un colis ou unité au sens de ce paragraphe.
En dehors du cas prévu ci-dessus, cet engin sera considéré comme colis ou unité ».

Plus précisément, le débat s’est porté sur la manière dont il fallait entendre le terme « énuméré ».
En l’espèce, une société C a organisé pour le compte de la société F, le transport de caisses de vin entre la Corée et Hong-Kong. Lors du transport, assuré par la société H, la cargaison est endommagée.

La société CH, assureur de la société F, a indemnisé cette dernière puis s’est retournée contre la société C et son assureur.
En appel, la Cour a considéré que l’indemnité due en application de la Convention de Bruxelles devait être calculée sur la base du nombre de palettes visé dans le connaissement – le document légal sur lequel sont visées la quantité de marchandises transportées et la destination.

Elle relevait en effet :
« En l’espèce, le connaissement mentionne le chargement de 387 caisses (10 palettes, 2265 pièces) et un conteneur ».

Pour elle, la limitation de responsabilité devait être calculée sur la base de 11 colis (10 palettes + 1 conteneur) et non sur la base de 387 caisses, dès lors que  celles-ci  n’étaient  pas  énumérées  dans  le connaissement,  que  les  caisses  étaient  regroupées  sur  des  palettes  filmées sans que le contenu de chaque palette puisse être identifié.

C’est donc une définition particulièrement stricte du terme énumérer qui avait été retenue par la Cour d’appel.

Procédant à la cassation de l’arrêt, la Cour de cassation se range à une interprétation plus souple de l’article en affirmant que « le connaissement portait mention du chargement de 387 caisses réunies en 10 palettes, de sorte que la limitation de responsabilité devait être calculée sur cette base ».
Si la Cour de renvoi suit la Cour de cassation sur ce point, l’indemnisation sera donc calculée sur la base de 388 colis (387 caisses + 1 conteneur) ce qui donne une indemnité de 258 667,96 DTS correspondant (selon la valeur du DTS au 22 mai 2019) à une somme de 315 574,91 €.

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